CKEA-FM concernant The Lockeroom

Comité décideur anglophone
Décision CCNR 20.2122-1304
2022 CCNR 3
25 mai 2022
S. Courtemanche (Présidente), S. Commer, V. Dubois, P. Gratton, K. Hesketh, R. Hildebrand, C. Scott

LES FAITS

The Lockeroom est une émission matinale que CKEA-FM (95.7 Cruz FM, Edmonton) diffuse en semaine de 5 h 30 à 10 h. Entre deux chansons, les animateurs Lochlin Cross, Grant Johnson et James White parlent actualité, culture populaire et enjeux sociaux, le tout souvent entrecoupé d’anecdotes personnelles. Le 10 février 2022, le segment « sujet du jour » diffusé vers 6 h 15 concernait les divergences d’opinion sur la vaccination contre la COVID-19.

Lochlin Cross a invité les auditeurs à exprimer leurs points de vue par téléphone ou par texto, puis il a donné sa propre opinion sur le sujet. Il a reconnu qu’il avait conscience de sa propre hypocrisie quand il disait qu’il fallait que la vie reprenne son cours normal après la pandémie, mais qu’il avait aussi des réticences à interagir avec des personnes non vaccinées. Le segment pertinent de la conversation entre Lochlin Cross et ses coanimateurs est présenté ci-dessous (une transcription plus complète se trouve à l’annexe A).

[traduction]

Lochlin Cross : J’essaie de comprendre les opinions des autres là-dessus. J’essaie vraiment. Mais pour être très honnête, je juge sévèrement les gens qui ne partagent pas mon point de vue.

Grant Johnson : Ouais?

L. C. : Et l’autre dose d’hypocrisie, c’est que je répète très souvent qu’il faut travailler sur ce type de jugement dans, dans la vie.

[...]

L. C. : Je, je vais être honnête. Et je vais vous donner une image. C’est un scénario débile, mais ça m’est arrivé cette semaine. Notre groupe d’amis prévoit se retrouver pour le Super Bowl dimanche.

G. J. : Ouais?

L. C. : Chez Kelly.

[...]

L. C. : C’est un pub.

G. J. : Au centre-ville.

[...]

L. C. : Il y a un ami dans notre groupe et, que Dieu le bénisse, c’est le genre de gars qu’on veut dans un groupe d’amis. Il possède tous les outils possibles et imaginables.

G. J : Ouais.

L. C. : Il vous arrange absolument tout. Il n’est pas super bon, mais il y arrive [Grant Johnson rit], il vous arrange absolument n’importe quoi. Et c’est, c’est un bon ami à avoir. C’est aussi le gars et, et là encore, je plaisante, mais c’est aussi le gars, si vous avez besoin d’enterrer un cadavre, vous appelez [P.]1.

G. J. : Il a un endroit.

L. C. : Il, il vit à, sur un grand terrain et c’est le genre de gars qui peut appeler, je pourrais l’appeler à trois heures du matin et dire, « J’ai tué Jimmy. J’ai tué Jimmy. Il faut que tu m’aides. »

G. J. : On parlait une fois d’incendier une voiture et il disait, genre, « non, faut le faire, genre, on le met dedans, on allume le feu dans un sac de croustilles– ».

L. C. : Je ne vais jamais –

G. J. : « Ensuite il se consume et... »

L. C. : Je n’aurais jamais besoin de me débarrasser d’un cadavre. [Les autres rient.] Ok? Disons-le bien haut. J’essaie juste de vous montrer le genre d’ami qu’il est.

G. J. : Ouais.

L. C. : C’est bon? J’ai évité Weird [J.], c’est son surnom dans notre groupe d’amis [Grant Johnson a un petit rire], parce qu’il n’est pas vacciné. Et je sais qu’il s’est convaincu – et ça le regarde – qu’il n’avait pas besoin de ça.

G. J. : Ouais.

L. C. : C’est bon ? Ok? Je ne suis pas d’accord avec lui. Et je l’ai évité.

G. J. : Mm hm.

L. C. : J’ai évité ses appels téléphoniques. Évité ses textos. Et il compte aller chez Kelly dimanche. Et pour être franc, ma première réaction a été « je ne veux plus y aller maintenant ». [Grant Johnson rit.] Et je vais vous dire pourquoi. Pas parce que je ne respecte pas ce qu’il, rhââ ... C’est lui qui a choisi de ne pas se faire vacciner. Et j’essaie de respecter sa décision quel que soit ce qu’il, ce, ce, quelle que soit sa décision. Je ne veux pas avoir une discussion sur le thème du « je te l’avais bien dit ».

G. J. : Ouais.

[...]

L. C. : Mon raisonnement là-dessus, c’est que je ne veux pas avoir ce genre de conversation, genre « je t’avais dit que c’était complètement… ! ».

G. J. : Bien.

L. C. : « Tu vois ? Tu vois ?! »

G. J. : Ouais. Juste essayer de regarder le football et de boire une bière.

L. C. : Est-ce que, est-ce que, et je, littéralement, j’étais, genre, « je reste chez moi, maintenant ». Ensuite j’étais, genre, « pourquoi est-ce que je fais ça? »

G. J. : Ouais.

L. C. : Qu’est ce qui cloche chez moi?

G. J. : Parce que c’est ce que je ressens. Genre, ce n’est pas que je n’irai pas, que ne veux pas y aller ou quoi que ce soit, mais je ne veux pas avoir ce genre de discussion avec les gens. C’est, comme, ...

L. C. : Ça ne devrait pas me faire rester chez moi.

G. J. : Non, ça ne devrait pas.

Le 15 février, le CCNR a reçu une plainte concernant cette diffusion. Le plaignant, qui est l’ami évoqué par les animateurs, protestait vivement contre la divulgation de son statut vaccinal, un renseignement médical d’ordre privé et confidentiel, et affirmait qu’il ne les avait pas autorisés à dévoiler son nom ou à faire de lui leur sujet de discussion. Il protestait aussi contre l’association de son nom à des activités criminelles telles qu’une dissimulation de cadavre ou un incendie de voiture et soutenait que ces commentaires étaient calomnieux et qu’ils l’avaient plongé dans un immense embarras. Dans sa lettre au CCNR, il écrit :

[traduction]

Le problème que me pose cette balado, c’est que je me trouve être l’« ami » dont il parle. [...] Je suis profondément ulcéré et dégoûté de voir que Lochlin a eu l’audace de faire état de mon statut vaccinal pendant cette émission en direct. Les renseignements médicaux sont d’ordre privé et confidentiel – je ne l’ai pas autorisé à citer mon nom ou à faire de moi son sujet de discussion.

[...] Non seulement Lochlin a-t-il eu l’audace de communiquer mes renseignements médicaux personnels, mais il a aussi dit que j’étais l’ami à appeler si vous aviez besoin de dissimuler un cadavre. Ensuite, Grant s’y est mis et a raconté que j’avais expliqué comment incendier une voiture et provoquer un incendie avec un sac de croustilles – ces deux déclarations sont de pures diffamations. Ce n’est pas la première fois qu’ils disent de moi que je suis la personne qu’ils iraient voir s’il fallait qu’ils dissimulent un cadavre – ils l’ont dit dans plusieurs émissions. J’ai déjà fait part de mon malaise à Lochlin et je lui ai demandé de ne pas tenir ce genre de propos calomnieux sur moi en ondes, et il a dit qu’il ne le ferait pas, mais voilà, il l’a encore fait.

La goutte qui a fait déborder le vase est la mention de mon statut vaccinal – là, il a dépassé les bornes. Des amis, ma famille et des collègues de travail m’ont appelé après l’émission pour me dire qu’ils l’avaient écoutée en allant travailler, ce qui m’a mis dans un extrême embarras.

Le 17 février, le directeur de la programmation de la station a répondu au plaignant ce qui suit :

[traduction]

Nous examinons sérieusement toutes les plaintes que nous recevons, et je suis désolé d’apprendre ce qui s’est passé. Comme vous le savez, Lochlin se montre excessivement personnel et concret en ondes, au point d’en oublier qu’il a un public. Je ne cherche en aucun cas à trouver des excuses à l’un ou l’autre des animateurs ou à prendre leur défense car ce n’était pas approprié, et je peux vous assurer que des mesures ont été prises pour s’assurer que cela ne se reproduise pas.

Le plaignant a déposé une demande de décision le 21 février. Il a déclaré que cette réponse semblait excuser la conduite déplacée de Lochlin Cross, a demandé si cette façon d’agir respectait le code de déontologie en matière de radiodiffusion et réitéré ses préoccupations.

[traduction]

Il est inacceptable de divulguer des renseignements médicaux personnels dans une émission en direct – aucune autorisation n’a été donnée pour cela et les renseignements médicaux sont d’ordre privé et confidentiel – point final.

Faire des commentaires sur moi en parlant de dissimulation de cadavres ou d’allumage d’incendie de voitures sous-entend que je participe à des activités criminelles ou que je suis un criminel – ces commentaires sont complètement faux. J’estime que ces commentaires scandaleux sont calomnieux et diffamatoires – je détiens un titre professionnel et je travaille dans la même industrie depuis 30 ans – ces commentaires scandaleux m’ont plongé dans un immense embarras car des amis, ma famille et des collègues ont communiqué avec moi après l’émission.

(Toute la correspondance afférente se trouve à l’annexe B.)

LA DÉCISION

Le comité décideur anglophone a étudié la plainte à la lumière de l’article 6 du Code de déontologie de l’Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR) et a également pris en considération la raison d’être de l’article 5.0 du Code de déontologie journalistique de l’Association des services de nouvelles numériques et radiotélévisées du Canada (ASNNR).

Code de déontologie de l’ACR, article 6 – Présentation complète, juste et appropriée

C’est un fait reconnu que la tâche première et fondamentale de chaque radiotélédiffuseur est de présenter des nouvelles, des points de vue, des commentaires ou des textes éditoriaux d’une manière complète, juste et appropriée. Ce principe s’applique à toute la programmation de la radio et de la télévision, qu’il s’agisse des nouvelles, des affaires publiques, d’un magazine, d’une émission débat, d’une émission téléphonique, d’entrevues ou d’autres formules de radiotélévision dans lesquelles des nouvelles, des points de vue, des commentaires ou des éditoriaux peuvent être exprimés par les employés du radiotélédiffuseur, leurs invités ou leurs interlocuteurs.

Code de déontologie journalistique de l’ASNNR, Article 5.0 – Respect

Les journalistes se montrent toujours respectueux et tiennent compte en tout temps de la pertinence d’un récit pour l’intérêt public.

[...]

5.5 Nous n’empiéterons pas sur la vie privée d’une personne à moins qu’il y ait un intérêt supérieur en jeu.

Les membres du comité décideur ont lu toute la correspondance afférente et écouté un enregistrement de l’émission en cause. Le comité a conclu à l’unanimité que CKEA-FM avait enfreint l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR et l’article 5.0 du Code de déontologie journalistique de l’ASNNR pour ce qui était de la vie privée. Les membres du comité ont aussi majoritairement conclu que plusieurs commentaires sur le plaignant ne respectaient pas l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR.

Les questions soumises au comité sont les suivantes.

1) CKEA-FM a-t-elle enfreint l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR et l’article 5.5 du Code de déontologie journalistique de l’ASNNR en divulguant le statut vaccinal de cette personne contre la COVID-19?

Le CCNR a expliqué dans d’anciennes décisions que l’identité d’une personne devait avoir été révélée en ondes pour déterminer s’il avait atteinte à la vie privée. Autrement dit, les renseignements communiqués en ondes sur une personne doivent permettre au grand public d’identifier cette personne et ne doivent pas seulement permettre aux amis, à la famille ou aux connaissances de cette dernière de l’identifier.

De plus, le plaignant n’a en l’occurrence aucunement cherché à joindre la station avant la diffusion et n’a pas consenti à la divulgation de son statut vaccinal en ondes. Il se trouve qu’il était un ami de l’animateur Lochlin Cross et que ce dernier-ci voulait inciter le public à discuter de ses propres réticences à aller rejoindre un ami non vacciné pour regarder le Super Bowl dans un pub du coin. L’animateur a identifié cet ami en utilisant son nom de famille puis, un peu plus tard dans le même segment, son surnom qui comprend son prénom complet.

Dans CTV concernant Canada AM (Bizutage du Régiment Airborne) (Décision CCNR 94/95-0159, 12 mars 1996), la plaignante s’est dite préoccupée par la couverture médiatique des pratiques de bizutage du Régiment Airborne canadien. La téléspectatrice était troublée par ce qu’elle considérait être une atteinte à la vie privée à l’égard des personnes présentées dans la vidéo domestique enregistrée par un membre (ou des membres) du Régiment Airborne et diffusée par le réseau CTV, car aucune tentative n’avait été faite pour masquer l’identité des [traduction] « victimes de cette dégradation ». Le CCNR n’était pas d’avis que la couverture de l’incident avait violé le droit à la vie privée de qui que ce soit pour les raisons suivantes :

Ce que nous voulons dire ici c’est que ce n’est pas tellement l’enregistrement et la diffusion de l’image même d’une personne, mais plutôt l’identification d’une personne qui pose un problème. Lorsque le télédiffuseur ne fournit aucun renseignement qui puisse permettre au public en général d’identifier la personne, comme c’est le cas ici, le télédiffuseur n’a pas entravé le droit à la vie privée de cette personne. Le fait que la personne filmée et ses proches savent de qui il s’agit ne porte pas atteinte à son droit de rester anonyme devant le public en général.

De plus, il se produit occasionnellement des cas où l’intérêt public, dans le cadre d’un événement, peut dépasser les intérêts par ailleurs légitimes de particuliers à voir protégées de l’œil inquisiteur de la caméra leur identité et leurs activités.

Dans CITY-TV concernant Speakers Corner (Décision CCNR 97/98-0572, 28 juillet 1998), CITY-TV avait trouvé un moyen de permettre aux piétons de pénétrer dans la cabine de Speakers Corner située à l’extérieur de son immeuble de Toronto et de s’enregistrer en train de parler de n’importe quel sujet. Certains extraits de ces enregistrements avaient été diffusés dont l’un avait fait l’objet d’une plainte. L’objection visait un orateur qui parlait des politiques du gouvernement de l’Ontario en matière de travail et du bien-être social et a critiqué le gouvernement pour permettre d’acheminer l’argent des contribuables à [traduction] « des personnes qui ne font que rien faire et toucher des prestations d’invalidité. » La plaignante pensait que [traduction] « le segment fait référence à mon cas précis et a décrit mon handicap ainsi que les circonstances entourant mon invalidité afin, à mon avis, de nuire, de choquer et de discriminer. La personne qui a présenté les allégations est un membre de ma famille; il ignorait, et ignore toujours, les détails de ma situation. » Le comité n’a pas conclu à une violation du code car l’orateur n’avait pas identifié la plaignante et que le télédiffuseur avait supprimé tous les éléments susceptibles d’identifier cette dernière avant la diffusion de ce segment.

Les animateurs en ondes d’une tribune radio téléphonique ont été ciblés par une plainte dans CJMS-AM concernant des commentaires faits dans le cadre de deux épisodes de Le p’tit monde à Frenchie (Décision CCNR 04/05-0939, 24 octobre 2005). Dans le cadre du premier épisode, l’individu avait téléphoné à l’émission en se servant d’un pseudonyme et avait critiqué les animateurs. Ceux-ci ont répondu en faisant des commentaires tout aussi critiqueurs au sujet de l’interlocuteur, et une fois l’appel coupé, ils ont tenté de le rappeler et ont annoncé son numéro de téléphone sur les ondes à maintes reprises. Dans le cadre du deuxième épisode, qui a été diffusé quatre jours plus tard, une femme a téléphoné à l’émission et a révélé le vrai nom du plaignant. Le comité a conclu à une atteinte à la vie privée du plaignant même si les critiques à son endroit ne constituaient pas une infraction au code.

Rien ne justifiait que les coanimateurs Jarraud et Daigneault permettent de divulguer le numéro de téléphone du plaignant sur les ondes. Bien qu’ils auraient été responsables si une tierce partie l’avait révélé, la décision de diffuser ce renseignement était entièrement la leur. Les ondes publiquement autorisées ne sont pas là pour véhiculer des commentaires privés à caractère vindicatif. Et, le fait qu’elles aient effectivement servi dans ce but dans la présente affaire enfreint l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR, ainsi que l’esprit de l’article [concernant la vie privée] du Code de déontologie de l’ACDIRT.

Ce Comité estime utile de se prononcer également sur la diffusion du 10 janvier, pendant laquelle l’interlocutrice Jeannine a annoncé le nom du plaignant. Il ne considère pas que la diffusion d’un nom a lui seul, sans d’autres renseignements permettant d’identifier la personne, pose nécessairement un problème ou déroge à une quelconque des normes codifiées des radiotélédiffuseurs privés. Après tout, il arrive souvent que les gens qui appellent une émission de ligne ouverte ou qui sont invités à enregistrer, pour diffusion plus tard, leur opinion ou leurs commentaires au sujet d’une question, donnent précisément ce renseignement. [...] Le problème se pose lorsque le but n’est pas anodin, comme ce fut le cas dans l’émission du 10 janvier. Le nom n’a pas été diffusé à propos de l’appel du plaignant. Il a été diffusé quatre jours plus tard, ce qui constitue un geste qu’on ne peut que caractériser de gratuit ou de malveillant. Qui plus est, n’importe qui aurait pu faire le lien entre ce nom et le numéro de téléphone diffusé le 6 janvier. Il n’y avait absolument aucune raison d’identifier le plaignant sur les ondes. Que « Jeannine » ait révélé le but de son appel au producteur de l’émission ou au responsable du triage des appels, ou qu’elle les ait trompés à cet égard, les animateurs n’auraient pas dû permettre la diffusion de ce renseignement. Ce n’est pas le problème du plaignant s’ils ont été négligents ou s’ils n’avaient pas les moyens techniques voulus. C’est le problème de la station. En n’empêchant pas la diffusion du nom du plaignant dans les circonstances se rapportant à la présente affaire, la station a enfreint l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR, ainsi que l’esprit de l’article [concernant la vie privée] du Code de déontologie (journalistique) de l’ACDIRT, tel qu’indiqué au paragraphe précédent.

Dans CHKG-FM concernant Lac Viet Radio (Décision CCNR 05/06-0023, 9 mai 2006), un auditeur d’une station de langue asiatique avait écrit à la station pour se plaindre du fait qu’elle ne jouait pas l’hymne national du Vietnam au début de ses émissions et ne mettait pas non plus le drapeau vietnamien en montre lors de ses événements. En raison des tensions historiques entre le Vietnam du Nord et le Vietnam du Sud, l’auditeur estimait qu’il était inapproprié d’avoir échoué la diffusion de l’hymne national ainsi que la présentation du drapeau vietnamien. Le radiodiffuseur avait décidé qu’il souhaitait demeurer neutre en ce qui concerne les questions controversées à caractère politique. L’auditeur a ensuite publié, dans les publications canado-vietnamiennes, au moins deux lettres ouvertes critiquant la station. Il aurait également critiqué la station verbalement à l’occasion d’une rencontre communautaire. La station a réagi en annonçant son nom sur ondes et déclarant, également sur les ondes, qu’étant donné qu’il l’avait dénoncée publiquement, elle n’accepterait plus ses appels téléphoniques à l’émission de ligne ouverte. L’auditeur s’est ensuite plaint au CCNR au sujet de ces annonces en disant qu’il s’agissait d’accusations injustes et inexactes à son endroit. Le comité n’a pas trouvé une violation du Code de déontologie de l’ACR :

Dans l’affaire en cause, le comité conclut que le radiodiffuseur a fait preuve d’un grand soin et d’une grande sensibilité. Il s’est montré prudent dans ses commentaires. Il n’a pas porté de condamnation. Il a expliqué avec un soin minutieux les raisons pour lesquelles il n’autorisait plus M. Tien à accéder à ses ondes. Ce faisant, il a expliqué le choix qu’il avait fait de se placer au-dessus de la mêlée politique dans le cas d’enjeux vietnamiens délicats tels que la diffusion de l’hymne national ou la présentation du drapeau. Ses déclarations ne visaient peut-être même pas le plaignant, mais plutôt les problèmes que celui-ci soulevait. [...]

Toutefois, aux yeux du comité, l’essentiel est que il s’agissait du plaignant lui-même qui a rendu toute l’affaire publique en publiant deux lettres ouvertes dans des périodiques canado-vietnamiens. Il a centré son attention sur les questions qui l’intéressait et a critiqué Lac Viet Radio devant essentiellement le même auditoire qui pouvait fort bien être celui de l’émission radiophonique hebdomadaire. De plus, c’est lui qui a d’abord choisi de rendre ces questions publiques. Le comité reconnaît que les sensibilités propres à des enjeux culturels vietnamiens dépassent ses compétences, mais ici le différend se situe ailleurs. La question est une question d’accès. M. Tien a eu le sien. Justice veut que Lac Viet Radio puisse répondre. Non seulement la station de radio a-t-elle répondu, mais elle a répondu de façon modérée et même généreuse en invitant M. Tien à reparaître à son émission, et ce après avoir décidé de ne pas le faire. Le Comité trouve que la station a fait preuve d’équité exemplaire et il estime que ses émissions n’ont pas enfreint la disposition qui précède.

Une entrevue radio avec le coanimateur fraîchement licencié d’une émission d’affaires publiques diffusée par la chaîne francophone TQS a fait l’objet d’une plainte dans CHMP-FM concernant une séquence diffusée dans le cadre de Puisqu’il faut se lever (Décision CCNR 06/07-0607, 7 avril 2008). En entrevue, ce dernier affirmait avoir été licencié à cause des nombreuses plaintes déposées contre lui par « des ethnies », de l’Association du Barreau du Québec et deux hommes politiques individuels qu’il a nommés. Un de ces hommes politiques s’est plaint que le radiodiffuseur n’aurait pas dû permettre au coanimateur de la télévision de l’identifier sur les ondes puisque ce n’était pas son intention que sa plainte contre TQS devienne une affaire publique. Bien qu’il ne soit pas normalement permis aux radiodiffuseurs de nommer les plaignants ou de fournir d’autres éléments d’information sur les ondes qui permettraient de les identifier, le comité n’a pas conclu à une infraction pour les raisons ci-dessous.

La présente affaire s’articule en grande partie sur les circonstances spéciales se rapportant à la plainte qui fut déposée. Premièrement, le Comité trouve que la caractérisation, faite par le plaignant, du commentaire de Stéphane Gendron, à savoir « mesquin », n’est pas fondée. Le Comité a examiné la transcription et écouté attentivement le ton des commentaires de l’animateur congédié. Il considère que M. Gendron n’a aucunement affiché un ton agressif quant à la liste des six plaintes faites, disait-il, au CRTC (en effet, ces plaintes avaient été envoyées au CCNR ou réglées par celui-ci). [...] À tout le moins, M. Gendron semblait plutôt stupéfié par la tournure des événements et son propre congédiement. Le Comité n’a pas détecté de caractère hostile ou vindicatif, ce qui constitue une question matérielle dans les cas qu’il a tranchés dans le passé [...].

Le Comité accorde également un poids considérable au fait que le plaignant en l’occurrence était une personne en vue et qu’il agissait de la sorte. Non seulement la plainte déposée au sujet de CHMP a-t-elle été envoyée au CCNR sur le papier à en-tête de l’Assemblée nationale, mais la plainte signalée à l’origine, soit celle du 30 octobre 2006 concernant un épisode de L’avocat et le diable à l’antenne de TQS a, elle aussi, été envoyée sur le papier à en-tête de l’Assemblée nationale. Chose toute autant pertinente, la plainte dans le cas étudié en 2006 a été envoyée à l’origine au CRTC (lequel l’a acheminée au CCNR pour que celui-ci la tranche dans le cours normal de ses activités). Dans pareil cas, le CRTC a pour pratique de verser la plainte reçue comme telle dans le dossier public du radiodiffuseur, et l’on peut présumer que n’importe quel membre du public le sache ou ait, du moins, aucun droit de s’opposer à un traitement « public » du genre. Bien entendu, cela ne revient pas à dire qu’un législateur, que celui-ci soit du palier provincial ou fédéral, n’a pas le droit de déposer une plainte. Cela signifie plutôt qu’il est raisonnable de s’attendre qu’une personne qui le fait sur la papeterie de l’État s’occupe des affaires de l’État et qu’il ou elle est donc davantage assujetti à l’examen du public.

Une auditrice d’une station de radio avait fait parvenir ses commentaires à la station sous forme de message privé placé sur Facebook dans CFBK-FM concernant le segment « Shots & Afterthoughts » (Décision CCNR 14/15-0554, 28 août 2015). L’animateur a répondu à ces critiques dans le segment éditorial de l’émission « Shots & Afterthoughts ». Après avoir cité son nom au long, il s’est attaché à répliquer aux reproches concernant son style d’interview et ses compétences d’animateur. La plaignante croyait que l’animateur avait violé sa vie privée en la nommant à la radio par son nom et qu’il avait terni sa réputation et l’avait intimidée en ondes. Le comité a conclu que les propos de l’émission n’avaient rien d’offensant à l’égard de l’auditrice et a aussi conclu que le fait d’avoir diffusé son nom sur les ondes ne constituait pas une violation du code étant donné les circonstances particulières :

Bien que l’animateur en ondes, Grant Nickalls, ait réagi aux critiques à son égard sur un ton plutôt défensif, le comité décideur n’est pas d’avis que ses propos aient été extrêmement diffamatoires à l’égard de la plaignante [...], ou qu’il ait tenté de l’intimider en ondes comme elle l’affirme. Le comité a écouté une heure complète de l’émission avant, pendant et après le segment en litige, et pas une seule fois n’a entendu le mot hater que mentionne la plaignante. Au contraire, Monsieur Nickalls a été poli, allant jusqu’à remercier la plaignante pour ses commentaires sur la programmation et pour son écoute.

[…]

Outre les propos la concernant, la plaignante est troublée par le fait que Monsieur Nickalls ait dévoilé son nom. Sur cette question de confidentialité, le comité décideur estime qu’envoyer un message à la station sur son site Facebook de manière à ce qu’il puisse être lu par tous les employés n’est pas la façon appropriée d’invoquer la confidentialité. La plaignante affirme avoir envoyé ses commentaires dans ce qu’elle appelle un « message privé », qu’elle a adressé au groupe de la station sur Facebook et non pas affiché sur le babillard; pour cette raison, elle estime que la station devait s’abstenir de mentionner son nom en ondes.

Bien que le message n’ait pas été affiché au mur du destinataire pour que la communauté Facebook tout entière puisse le lire, il reste qu’il a été envoyé à l’ensemble des employés de la station et ne comportait aucune mention de confidentialité. Pour être considéré comme confidentiel, un message doit normalement être adressé, par courriel ou par lettre, à une personne en particulier avec la mention « personnel et confidentiel ». Quoiqu’il soit compréhensible que la plaignante n’ait pas pensé à préciser cette indication sur son message, il reste que toute personne qui adresse des commentaires généraux à une station doit normalement s’attendre à ce qu’il en soit question en ondes. Le même principe s’applique aux courriels qu’on envoie à une adresse générale (plutôt qu’à une personne en particulier), aux formulaires qu’on remplit en ligne pour établir un contact, à un appel téléphonique sur la ligne d’un studio et aux messages expédiés par le truchement d’un réseau social comme Facebook et Twitter. […]

Cela étant dit, le comité observe que le fait de citer le nom de la plaignante n’ajoutait rien aux commentaires de Monsieur Nickalls, même si ceux-ci n’étaient certes pas diffamatoires. Le comité estime que les radiodiffuseurs devraient se garder de nommer des personnes en ondes, même quand les commentaires à leur égard n’ont rien de déplaisant. Le comité ajoute que s’il y avait eu des informations additionnelles à propos de la plaignante (par exemple, son adresse ou le nom de son employeur), sa décision aurait vraisemblablement été différente.

Dans une séquence intitulée « réveil-anniversaire » qui revient dans l’émission, l’animateur complote avec les amis et la famille d’une personne pour lui jouer un tour le jour de son anniversaire de naissance. Dans ce « réveil-anniversaire » en particulier, l’animateur a téléphoné à une femme qui fêtait son 18e anniversaire dans CIKI-FM concernant une blague dans le cadre de l’émission Tout le monde de debout (Décision CCNR 0203-0358, 17 juillet 2003). L’animateur a diffusé le nom complet et l’âge de la femme et le nom de la résidence d’étudiants où elle habitait. Il lui a fait croire qu’il voulait sortir avec elle à cause, disait-il, de tout ce qu’il avait entendu dire sur sa prouesse sexuelle. La plaignante était préoccupée par les aspects relatifs au respect de la vie privée de la femme, soit la diffusion en détail de renseignements personnels, en plus des commentaires sexuels mentionnés en ondes. Le comité a souligné que si la « victime » n’y avait pas consenti, la divulgation de ces renseignements détaillés aurait enfreint le code; toutefois, le comité ne disposait d’aucun renseignement lui permettant de juger la question de consentement et donc n’a constaté aucune violation de l’article 6 pour l’atteinte à la vie privée. Il a noté que « la blague aurait pu fonctionner aussi bien avec le prénom ou même un nom fictif. Bref, il n’y avait même pas de raison péremptoire ou justifiable pour fournir des renseignements si exacts et susceptibles d’utilisation abusive par un auditeur ».

Dans le cas présent, les membres du comité conviennent à l’unanimité que plusieurs facteurs les incitent à conclure que l’identification du plaignant et la divulgation de son statut vaccinal constituent une atteinte claire et scandaleuse à la vie privée, contraire à l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR et à l’article 5.5 du Code de déontologie journalistique de l’ASNNR. Ces facteurs sont notamment :

Le comité a aussi évalué si la simple utilisation du surnom du plaignant pouvait représenter une violation des dispositions pertinentes du code de protection de la vie privée. Tel qu’expliqué dans les précédents cités ci-dessus, la facilité avec laquelle le grand public peut identifier une personne est un facteur clé dans toute décision touchant à une possibilité d’atteinte à la vie privée. Bien qu’il soit inutile dans le cas présent de prendre une décision à cet égard, le comité estime que l’utilisation du simple surnom de la personne ne constituerait vraisemblablement pas une atteinte à la vie privée. Cela dit, il croit fermement que l’identification de cette personne pour les besoins de la discussion n’était absolument pas nécessaire et qu’elle n’a ni étayé le point de vue que l’animateur souhaitait faire valoir en ondes, ni servi l’intérêt public.

2) CKEA-FM a-t-elle enfreint l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR pour avoir émis d’autres commentaires sur le plaignant ?

Comme nous l’avons vu plus haut, Lochlin Cross a émis plusieurs commentaires sur la personnalité suspecte du plaignant. Tentant de paraître drôle et léger, il a dit en ondes qu’il s’agissait d’un ami et a laissé entendre à la blague que ce dernier était un personnage soit louche, soit à moitié criminel puisque c’était lui qu’il fallait appeler pour arranger des choses, notamment enterrer un cadavre ou incendier une voiture. De telles remarques avaient le pouvoir de plonger le plaignant dans un grand embarras, ce dernier ayant fait remarquer qu’il détenait [traduction] « un titre professionnel » et qu’il travaillait [traduction] « dans la même industrie depuis 30 ans ».

Dans CIQC-AM concernant Galganov in the Morning (atteinte à la vie privée) (Décision CCNR 97/98-0509, 14 août 1998), l’animateur d’une tribune téléphonique avait donné le nom complet de la plaignante sur les ondes et l’avait insultée pour avoir présenté une plainte au CCNR concernant un épisode antérieur de l’émission. Il avait aussi autorisé plusieurs auditeurs à insulter cette dernière avec des termes comme [traductions] « un défaut de caractère » et « une personne inférieure ». Le comité a alors conclu à une infraction.

Dans ce cas-ci [...] le Conseil ne doit pas traiter de commentaires généraux adressés à un groupe idéologique, mais d’une forte critique à l’endroit d’un individu spécifique et identifié qui ne bénéficie pas du même accès aux ondes. Le Conseil considère que le pouvoir considérable généré par le média de radiodiffusion dicte que la personne chargée d’exercer ce pouvoir n’en abusera pas en l’utilisant contre des individus relativement « sans défense ».

[...]

Le Conseil reconnaît pleinement que des commentaires critiques peuvent être émis sur des individus, en particulier sur des personnalités publiques mais aussi, dans des circonstances appropriées, sur des particuliers. La question que doit toujours examiner le Conseil porte sur la déclaration et les circonstances qui l’entourent. À son niveau premier, l’exigence de justesse établie dans [...] l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR précise qu’un équilibre doit être trouvé entre le type et l’étendue des critiques dirigées vers un individu et l’opportunité ou le mérite de telles critiques lorsqu’elles sont mesurées aux actions ou aux comportements qui sont critiqués. La bienséance, la seconde exigence figurant dans le même paragraphe figurant dans le même paragraphe, détermine que les ondes publiques ne seront pas utilisées pour des attaques personnelles hors de propos ou gratuites au sujet de particuliers. Le Conseil considère que l’émission d’Howard Galganov diffusée le 9 décembre a enfreint ces deux principes.

Les membres du comité concluent majoritairement que les commentaires sur la personnalité du plaignant constituent une violation de l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR. Certes, ils comprennent que les matinales des stations musicales sont censées être légères et insuffler une touche d’humour aux sujets abordés. Toutefois, le contexte des commentaires entendus dans le cas présent – le plaignant a été clairement identifié, son statut vaccinal a été divulgué et l’animateur a ensuite ajouté des remarques blessantes sur sa personnalité – constitue une infraction au code. Que Lochlin Cross ait dit qu’il blaguait ne rend pas ses commentaires acceptables dans les circonstances. Non seulement le plaignant n’a-t-il consenti à rien et n’a-t-il pas communiqué avec la station pour participer aux plaisanteries de l’animateur de l’émission du matin, mais il avait apparemment déjà prévenu ce dernier qu’il ne souhaitait pas être ciblé par ses plaisanteries.

Par-dessus-tout, il n’était nul besoin dans tout ce segment d’identifier le plaignant pour faire avancer la discussion. Lochlin Cross n’aurait tout simplement jamais dû identifier clairement le plaignant au cours de la discussion. Le comité estime à la majorité que n’importe qui serait profondément blessé par de tels commentaires, même dits à la blague, car le fait de dire de quelqu’un qu’il est la personne à appeler pour enterrer un cadavre ou incendier une voiture peut plonger la victime de tels commentaires complètement inutiles dans un extrême embarras, ce qui a effectivement été le cas ici.

Opinion dissidente de P. Gratton et C. Scott

Selon nous, les commentaires de Lochlin Cross sur la personnalité du plaignant ne constituent pas une violation de l’article 6 du Code de déontologie de l’ACR. Nous pensons plutôt que ces plaisanteries n’auraient pas constitué une violation du code si ces commentaires avaient été faits sans identifier clairement le plaignant, voire en utilisant seulement le surnom de ce dernier. Les commentaires sur des activités illégales relevaient évidemment de la satire et nous estimons que les codes autorisent ce genre de contenu.

Nous croyons qu’il faut séparer la question des commentaires disgracieux de celle du statut vaccinal du plaignant. De ce point de vue, les commentaires pris hors contexte de la divulgation du statut vaccinal ne sont pas assez significatifs pour être considérés comme une infraction. Il convient aussi de noter qu’ils n’étaient pas tous négatifs ou désobligeants. Lochlin Cross a vraiment dit que le plaignant était un bon ami, qu’il possédait tous les outils possibles et imaginables et qu’il pouvait arranger absolument n’importe quoi. Nous pensons que ces commentaires se voulaient humoristiques et qu’ils n’ont pas été dits de façon vindicative. Bien que l’on puisse contester leur bon goût, ils étaient acceptables dans le cadre d’une émission de radio en direct. En revanche, nous répétons qu’il n’était pas nécessaire dans les circonstances d’identifier clairement le plaignant.

Réceptivité du radiodiffuseur

Dans toutes les décisions rendues par le CCNR, ses comités évaluent dans quelle mesure le radiodiffuseur s’est montré réceptif envers le plaignant. Bien que le radiodiffuseur ne soit certes pas obligé de partager l’opinion du plaignant, sa réponse doit être courtoise, réfléchie et complète. Dans la présente affaire, la réponse de CKEA-FM, était acceptable, mais très superficielle. Dans ce cas précis, le comité croit, compte tenu de cette atteinte à la vie privée particulièrement scandaleuse, que le plaignant aurait aimé recevoir une réponse moins creuse et qu’il aurait gagné à ce que celle-ci soit plus sérieuse et à ce qu’elle reconnaisse la gravité de l’affaire. Pour autant, ce radiodiffuseur ayant rempli son obligation de se montrer réceptif, il n’y a pas lieu d’en exiger davantage de sa part, sauf pour l’annonce de cette décision.

ANNONCE DE LA DÉCISION

CKEA-FM est tenu 1) de faire connaître la présente décision selon les conditions suivantes : une fois pendant les heures de grande écoute, dans un délai de trois jours suivant sa publication, et une autre fois dans un délai de sept jours suivant sa publication, dans le même créneau horaire que The Lockeroom, mais pas le même jour que la première annonce, 2) de faire parvenir au plaignant qui a présenté la demande de décision, dans les quatorze jours suivant la diffusion des deux annonces, une confirmation écrite de son exécution et 3) au même moment, de faire parvenir au CCNR copie de cette confirmation accompagnée du fichier-témoin attestant la diffusion des deux annonces, qui seront formulées comme suit :

Le Conseil canadien des normes de la radiotélevision a jugé que CKEA-FM avait enfreint le Code de déontologie de l’Association canadienne des radiodiffuseurs lors d’une diffusion de The Lockeroom le 10 février 2022. Cruz FM a identifié une personne par son nom complet et divulgué le statut vaccinal de cette personne contre la COVID, en violation des dispositions des codes portant sur la présentation juste et sur la vie privée. De plus, les membres du comité ont majoritairement conclu que la station avait enfreint le Code de déontologie de l’ACR pour avoir diffusé d’autres commentaires négatifs sur le plaignant.

La présente décision devient un document public dès sa publication par le Conseil canadien des normes de la radiotélévision.

[1] Le CCNR a edité les nom et prénom du plaignant pour ne pas aggraver l’atteinte à la vie privée qui s’est produite.

APPENDIX A

The Lockeroom is CKEA-FM’s (95.7 Cruz) morning show hosted by Lochlin Cross, Grant Johnson and James White. It airs weekdays from 5:30 am to 10:00 am. In between songs, the hosts discuss current affairs, pop culture and social issues and often share personal anecdotes. On February 10, 2022, around 6:15 am, the “Topic of the Day” segment was about differences of opinions on COVID-19 vaccination. The dialogue went as follows:

Cross: 780-989-0957 if you ever want to phone or text the show. This might be a phone call conversation today. Actually, I’ll say it out loud right now. I hope we get a couple of phone calls on this.

Johnson: Mm hm.

Cross: First off, I want to address the, um, the hypocrisy, my own personal hypocrisy revolving around where we’re going to go here.

Johnson: Okay.

Cross: Okay. And I, I want to point it out because I want people to be aware of the fact that I’m aware of my own personal hypocrisy.

Johnson: ʼKay.

Cross: More than a couple of times over the last couple of months I have said that we need to, um, draw a line in the sand, start over and we need to start getting back to some sense of normalcy.

Johnson: Yeah.

Cross: And a lot times when I say things out loud it’s because it’s something that I’m dealing with –

Johnson: You’re trying to work it out yourself.

Cross: I’m trying to work it out in my own head and, um, and, and I know at times maybe it sounds like I, I’m being a little bit preachy. But it’s sort of my process, right? I’m at a point right now where I’m realizing that, as a society, myself included in that society, I need to sort of, okay, I need to stop hiding in my basement and I need to start trying to live my life as normally as I possibly can. I still want to follow the rules. I have been a rule follower through this whole pandemic.

Johnson: Yeah.

Cross: I’ve been trying to do the right thing. I’ve been trying to take care of myself, my family and, and others. Um, I, I’ve been vaccinated. Um, and that’s what I believe. That’s what I believe I needed to do.

Johnson: Mm hm.

Cross: I’m trying to appreciate others’ opinions on this. I am, honestly. But I will be very honest, I’m judgemental of those that didn’t have the same viewpoint that I have.

Johnson: Yeah?

Cross: And another hypocrisy sort of element to this is I have commented multiple times that we need to work on that judgement sort of piece in, in life.

Johnson: Yes.

Cross: I think it’s actually killing us. I think the biggest problem we have on the planet right now is judgement. And I’m struggling with it.

Johnson: Yeah.

Cross: I, I’ll be honest. And I’ll paint a picture for you. And this is a stupid scenario, but it’s something that happened to me this week. Our friends group is planning to gather for Super Bowl on Sunday.

Johnson: Yeah?

Cross: At Kelly’s.

Johnson: Yeah.

Cross: Kelly’s is, is a, is a, is a spot we have in the past frequented. It’s –

Johnson: Down on 104th?

Cross: It’s a watering hole.

Johnson: Downtown.

Cross: It’s a watering hole.

Johnson: Great place. Great food.

Cross: Yes.

Johnson: Great beers.

Cross: And a bunch of people that we know like that place and sometimes we’ll go there to watch a, a UFC, a big UFC, a big boxing match, a big game like, like a football game like the Super Bowl. And there is somebody in our friends –

Johnson: Where you famously got so drunk that an Uber wouldn’t take you after Grey Cup.

Cross: That’s another story. [Johnson chuckles]

Johnson: Was that Grey Cup or Super Bowl?

Cross: Grey Cup.

Johnson: Grey Cup.

Cross: There’s a friend in our friends group and, god love him, he’s one of those guys you kind of want in your friends group. He has every tool known to man.

Johnson: Yeah.

Cross: He can fix absolutely anything. He’s not great at it, but he can [Johnson laughs], he can fix just about anything. And he, he’s a good friend to have. He’s also that guy, and, and, again, I’m joking, but he’s also that guy that, if you need a body buried, you call [P.]1.

Johnson: He’s got a place.

Cross: He’s, he lives out on the, out on an acreage and he is that guy that would call, I could call him at three o’clock in the morning and go, “I killed Jimmy. I killed Jimmy. I need you to help me.”

Johnson: We mentioned burning a car one time and he was, like, “No, you gotta do it, like you put it in, you start the fire in a chip bag –“

Cross: I will never –

Johnson: “And then it smoulders and ...”

Cross: I will never need to get rid of a body. [others laugh] Okay? Let’s say that out loud. I’m just trying to point out the kind of friend that he is.

Johnson: Yeah.

Cross: All right? I have avoided Weird [J.], which is his nickname in our friends group, [Johnson chuckles] because he’s not vaccinated. And I know he has convinced himself – and that’s his business – that he didn’t need to do that.

Johnson: Yeah.

Cross: Right? Okay? I don’t agree with him. And I have avoided him.

Johnson: Mm hm.

Cross: I have avoided his phone calls. I avoid his texts. And he’s planning on going to Kelly’s on Sunday. And I will be honest with you, my first instinct was “I don’t want to go now”. [Johnson laughs] And I’ll tell you why. Not because I don’t respect what he, ugh ... It was his choice not to get vaccinated. And I’m trying to respect that decision regardless of whatever it is that he, that, that, whatever the decision he made. I don’t want to sit down and have a conversation about “I told you so”.

Johnson: Yeah.

Cross: ʼCause with the, with the restrictions lifting, which is I believe we need to do now.

Johnson: Yeah.

Cross: I’m against the City putting in their own restrictions over and above what the Province is deciding to do for Alberta.

Johnson: Yeah?

Cross: I’m against that. My thought process revolving around this is I don’t want to have those conversations, like “I told you it was all ...!”

Johnson: Right.

Cross: “See? See?!”

Johnson: Yeah. Just trying to watch football and drink beer.

Cross: Is that, is that, and I’m, literally, I was, like, “I’m staying home now.” And then I was, like, “Why am I doing that?”

Johnson: Yeah.

Cross: What is wrong with me?

Johnson: ʼCause I feel that way. Like, not that I’m not going, don’t want to go or anything, but I don’t want to have those conversations with people. It’s, like, ...

Cross: It shouldn’t keep me at home.

Johnson: No, it shouldn’t.

Cross: Where’s everybody at right now? I, I thought that we could have a conversation about this this morning. These are my views. This is –

Johnson: Yeah.

Cross: This is who, this is what I’m struggling with. Right? I’m struggling with the fact that we, regardless of what we think individually, we all have to just move on. Right?

Johnson: Yeah.

Cross: Are you going to be able to hang out with friends and family that had an opposing opinion to you over the last couple of years? All right. That’s, that’s our conversation this morning. And, and, like I said, call if you want. 780-989-0957.

APPENDIX B

The Complaint

The CBSC received the following complaint via its webform on February 15, 2022:

Name of Station: 95.7 Cruz FM

Program Name: Lockeroom Topic of the Day

Date of Program: 10/02/2022

Time of Program: 6:00AM

Specific Concern:

On Feb. 10/2022 I was listening to the Lockeroom Topic of the Day – the topic was “Can you hang out with friends/family that had an opposing opinion” when Lochlin Cross went on to talk about how he had a friend that was not vaccinated and how the friends group was planning on going to watch the Superbowl at an Edmonton Pub – Kelly's – and he said that he didn't want to go if this friend was going.

The problem that I have here with this podcast is that I happen to be that ‘friend’ that he mentioned. My name is [J. P.] and I am completely appalled and disgusted that Lochlin had the audacity to mention my vaccination status during his live broadcast. Medical information is private /confidential information – I did not give him permission to say my name or use me for his topic of discussion.

During the live show my name was mentioned 3 times – I was referred to as “Weird [J.]” and then both Lochlin and Grant refer to my last name “[P.]”. Not only does Lochlin have the audacity to mention my private medical information on air, but he also refers to me as the friend that you could go to if you needed a body hidden. Grant then joins in and talks about how I mentioned how you could burn a car and start a fire with a chip bag – both of these statements are a direct defamation to my character. This is not the first time they have referred to me as someone they could go to if they needed a body hidden – it has been mentioned on several shows. In the past, I have expressed my concerns to Lochlin about not mentioning these kinds of derogatory things about me on the air and he said he wouldn't but here we are, yet again.

Mentioning my vaccination status is the straw that broke the camel's back – he crossed the line with this one. After that show, I had friends, family and work acquaintances call me to tell me they had heard the show on the way to work – this has caused me huge embarrassment.

I get the use of humor in broadcasting but constantly making comments/jokes at the expense of others says a lot about his character, or lack thereof. Please let me know if you have further questions as I would be happy to discuss further.

Broadcaster Response

The station replied to the complainant on February 17 with the following:

We review each complaint very seriously and I’m sorry to hear what happened. As you know, Lochlin is very personal and real on the air to a fault, where sometimes he forgets he has an audience. I’m in no way making an excuse for any of the hosts or coming to their defense, as this was not appropriate and I can assure you that steps have been taken to ensure this doesn’t happen again.

If you would like to discuss this further, you can reach out to me anytime, [###-###-####].

Once again, sincerest apologies.

Additional Correspondence

The complainant filed his Ruling Request on February 21 with the following comments:

I am completely appalled with the response of Program Director - CKEA-FM (95.7 CRUZ FM) [C. M.]. His laissez-fair [sic] attitude in saying that Lochlin was just being real and forgets that he has an audience sounds a lot like [the Program Director] is condoning Lochlin's inappropriate behavior and that Lochlin will likely not get more than a slap on the hand.

One would imagine that this industry requires some semblance of professionalism?

Does this industry not operate within a Code of Conduct/Ethics as their guide? One which maintains the highest level of personal integrity, honesty and business ethics?

Exposing one’s personal medical information on a live broadcast is unacceptable – no permission was given for this and medical information is private and confidential – end of story.

Making comments directed towards me regarding hiding dead bodies/starting car fires infers that I take part in criminal activities or am a criminal – these comments are totally false. I consider these egregious statements to be slanderous and a defamation to my character – I hold a professional designation and have been in the same industry for 30 years – these disparaging comments have caused me huge embarrassment as I had friends, family and colleagues reach out to me after that show.

Due to the reasons above, and my unsatisfaction [sic] with the response from [the Program Director], I am requesting the CBSC to proceed with reviewing my complaint. If you have any further questions please reach out. I thank you in advance for your time and consideration in this matter.